Le blog de Jean-Marc Ben

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Tag - Jean-Paul Besset

Fil des billets

mercredi 12 janvier 2011

Cécile Duflot : "Nous devons construire un programme de gouvernement écolo"


lemondefr_pet.bmp

12/01/2011

cecile-duflot-le-12-janvier-a-paris.jpg"2010 année de l'éclosion, 2011 année de l'enracinement." C'est par une métaphore jardinière que Cécile Duflot a présenté l'avenir d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) à un an de la présidentielle, lors de ses vœux à la presse, mercredi 12 janvier.

La secrétaire nationale a confirmé que le nouveau parti écologiste lançait sa fondation avec Jean-Paul Besset à sa tête et qu'EELV tiendrait son congrès en mai juste avant la consultation pour désigner leur candidat ou candidate à la présidentielle.

Les détails et le calendrier seront arrêtés par le conseil fédéral du mouvement les 29 et 30 janvier.

2011 sera aussi l'année des cantonales où les écologistes présenteront des candidats dans "la quasi-totalité" des cantons, a précisé Mme Duflot. Il s'agit bien d'ancrer le mouvement et surtout de prouver sa force et la prégnance de ses idées avant d'entamer les négociations avec le PS sur le contrat pour 2012. Car c'est bien cet objectif que visent les écolos après leurs succès successifs aux élections européennes de 2009 et aux régionales en 2010.

"Nous allons continuer à parler à l'intelligence des citoyens en défendant un projet capable de penser la politique à moyen et long termes. Nous devons construire un programme de gouvernement écolo", a insisté l'élue régionale.


"UN PROJET AUTONOME À DÉFENDRE"


Les interrogations des socialistes sur l'opportunité d'une candidature écologiste à la présidentielle et les dangers que feraient courir ses divisions à la gauche la laissent de marbre. "C'est une élection pas facile pour nous, reconnaît-elle, mais c'est la seule où on peut parler d'un projet alternatif au niveau national." EELV ira donc sous ses couleurs.

Quelques pas plus loin, Yves Cochet, challenger d'Eva Joly à la désignation, est sur la même longueur d'ondes : "Nous allons nous rassembler à gauche pour le second tour, mais notre vision du monde n'est pas celle du PS", argumente le député de Paris. "Les écolos s'inscrivent dans une alternative de gauche au sarkozysme, mais ils ont un projet autonome à défendre", renchérit Noël Mamère, député de Gironde.

Autour du buffet, ses camarades, eux, se réjouissaient du dernier sondage favorable à Eva Joly. L'ex-magistrate est considérée comme la candidate potentielle à la présidentielle de 2012 la plus sincère, et serait, parmi trois responsables écologistes évoqués pour la présidentielle, "la plus à même de lutter contre la crise économique et financière".

Sylvia Zappi


dimanche 12 décembre 2010

Intervention de Philippe Meirieu après son élection à la Présidence d'Europe Écologie-Les Verts


CONSEIL FÉDÉRAL, 11/12/2010

philippemeirieu.jpgOn n’accepte pas la responsabilité que vous m’avez confiée sans une certaine inquiétude. Et cette dernière est, de toute évidence, justifiée au regard des enjeux que nous avons à affronter collectivement. Enjeux internes, bien sûr, pour dépasser les difficultés que nous avons rencontrées ces dernières semaines, enjeux politiques pour préparer la séquence qui va nous mener jusqu’à notre Congrès, dans six mois, et enjeux écologiques qui, chaque jour plus pressants, nous imposent toujours plus de lucidité et de détermination.

Vous savez que je n’ai pas sollicité ce mandat et que je viens, à plus de soixante ans, d’arriver en politique. Je trouve, d’ailleurs, très extraordinaire et, pour tout dire, très courageux de votre part, de m’avoir élu. C’est aussi un signe que vous donnez de ce que peut être la « politique autrement », à mille lieues des appareils-machines construits par et pour des carrières… C’est pourquoi je suis fier que vous m’ayez choisi et je vous en remercie chaleureusement.

Je vous dois quelques mots sur l’ambition que nous pouvons avoir pour notre instance et, plus globalement, pour toutes les instances de notre mouvement. Cette ambition doit être grande. A la mesure de l’image positive que nous avons dans l’opinion. Les Français nous jugent généreux et crédibles, proches de leur préoccupations et porteurs d’une vision d’avenir. Nous devons nous montrer dignes de leur confiance… Et c’est vrai que nous sommes les seuls, je crois, à porter le souci de leur quotidien tout en travaillant à une vision globale de leur futur. Nous sommes les seuls à proposer un changement radical de paradigme pour faire face aux questions dramatiques auxquelles nous nous trouvons confrontés aujourd’hui. Nous sommes les seuls à appeler à une manière radicalement différente de penser le monde et notre rapport au monde. Nous sommes les seuls à incarner une alternative crédible au pillage de l’univers et à la concurrence mortifère entre les êtres. Nous sommes les seuls à faire de « la solidarité », sous toutes ses formes, le cœur de notre projet politique.

Pour autant, nous savons bien qu’en politique, ceux et celles qui s’engagent sont faits de chair et de sang, avec leurs qualités et leurs défauts, leur souci du bien commun et leurs imperfections quotidiennes. Nous revendiquons cette humanité. Nous sommes des hommes et des femmes « comme les autres ». Nous ne croyons pas que le fait de faire de la politique nous transforme en personnes exceptionnelles et inaccessibles, drapées dans leur « sérieux » pour faire oublier qu’elles n’ont plus de convictions ! Nous savons que nous dérangeons parce que nous entretenons avec nos convictions un rapport qui fonde notre engagement. Un rapport qui nous rend parfois plus sourcilleux, souvent un peu insupportables, mais toujours plus exigeants.

Ceux qui, aujourd’hui, se gaussent de nos soubresauts, savent-ils ce qu’il faut payer pour faire bonne figure dans le champ du politiquement correct médiatique ? Ce qu’il faut payer en hypocrisies. Ce qu’il faut payer en verrouillage par un polit bureau ? Ce qu’il faut payer en autoritarisme présidentiel ou en soumission dévote à une figure tutélaire ? Nous n’avons pas honte de nos tâtonnements. Et, d’une certaine manière, ils nous honorent. L’ironie ravageuse dans la presse sur les défauts des Verts et d’Europe Ecologie cache mal le mépris pour les efforts, laborieux certes, naïfs parfois, agaçants souvent, pour instituer une démocratie en actes dans une société qui confond le sondage d’opinion et l’expression citoyenne, le ressenti a priori et l’argumentation construite dans le débat. Face au populisme et à la démagogie, la démocratie est un combat. Et Les Verts ont historiquement mené ce combat. Europe Ecologie – Les Verts le mène aujourd’hui. Et je préfère nos difficultés assumées à la suffisance de ceux qui ne se posent pas de questions sur leur propre fonctionnement. Nous savons que la démocratie n’est pas spontanée et nous pensons que ceux qui prétendent le contraire sont des imposteurs. Nous savons aussi que des institutions démocratiques ne suffisent jamais à garantir un fonctionnement démocratique et que le respect des formes peut cacher bien des manipulations. En réalité, nous savons que, dans un mouvement politique, la démocratie est inséparable du travail quotidien pour la faire exister.

Et c’est à ce travail serein que je nous invite au sein de ce Conseil comme au sein de toutes nos instances. Nous devons maintenant transformer les turbulences de notre passé en propositions pour notre avenir. Nous devons nous apaiser sans perdre notre énergie. Nous devons apprendre à travailler ensemble, non pas en dépit de nos différences, mais grâce à nos différences, de cultures, de sensibilités, d’engagements antérieurs. Nous devons apprendre à nous respecter comme nous respectons le monde... Car, quoiqu’il soit galvaudé, ce mot de « respect » nous est cher.

Nous sommes sensibles, en effet, à tout ce qui abime le monde et c’est cela qui nourrit notre insurrection fondatrice, individuelle et collective. Nous sommes hostiles à la virtualisation du monde qui abolit la réalité des êtres et du temps, autorise toutes les manipulations et oublie la souffrance de nos semblables… Notre travail d’écologiste, c’est, le plus souvent, de redire, inlassablement, notre souci du monde et son respect. De faire primer ce souci du monde sur les luttes de ceux qui ne s’entendent que pour le piller. Nous voulons rendre la parole au monde. Au monde de la nature et des humains solidaires. Contre les errances de ceux qui pataugent dans les conflits permanents engendrés par leurs fantasmes de toute-puissance. À cet égard les écologistes sont des militants obstinés de la modestie. Et ils doivent mettre en œuvre cette modestie dans leurs méthodes de travail.

Etre écologiste en politique, c’est donc être attentif aux problèmes concrets à résoudre plutôt que de se disperser dans d’interminables procès d’intention. C’est se centrer sur de vrais objets de travail plutôt que de s’engluer dans les rapports de force. C’est regarder les choses avec le respect qu’elles exigent au lieu d’en faire des prétextes pour se positionner dans d’interminables calculs avec ses adversaires et ses alliés.

Mais tout cela requiert ce qu’il faut bien appeler une discipline, au sens le plus noble du terme. Cela requiert une extrême attention aux rituels structurants plutôt que de se perdre dans les excès de la « communication en temps réel ». Cela requiert de construire nos objets de travail et de nous donner des méthodes rigoureuses pour les traiter. Cela requiert d’expliciter les désaccords sans préjuger a priori de l’impossibilité de se mettre d’accord. Cela requiert de ne pas enfermer nos relations dans le couple infernal « adhésion / répulsion ». Cela requiert de ne pas folkloriser l’autre pour s’en débarrasser. Cela requiert d’expliciter obstinément et sans cesse nos positions pour qu’elles deviennent intelligibles à tous.

C’est ainsi que nous avancerons. C’est ainsi que nous garderons notre précieuse identité de « candides » en politique mais que nous parviendrons à convaincre de plus en plus, entre nous et autour de nous. C’est ainsi, aussi, que nous pratiquerons avec de plus en plus d’exigence cette démocratie interne que nous appelons tous de nos vœux et vers laquelle nous avançons… Permettez moi un mot à ce sujet : je crois – même si cela mérite d’être discuté – qu’il ne faut pas confondre la « démocratie d’élaboration » et la « démocratie de décision ». Il est normal, dans toute institution humaine, que les choses ne soient pas systématiquement construites de manière « démocratique » : il y a des compétences et des expertises qu’il faut valoriser et qu’il serait suicidaire de ne pas prendre en compte au nom du fait que cela ne serait pas « démocratique » ! Et cela, aussi bien dans les commissions thématiques que dans les commissions électorales ! Il n’y a rien de scandaleux à cela. C’est même un respect des militants. Une condition de réussite de la cause que l’on sert. En revanche, il est essentiel que les « experts » s’engagent à expliquer clairement leurs propositions à tous et que ce soit les assemblées de militants ou d’élus qui décident en dernier ressort.

Permettez moi de conclure en vous disant à quel point il me paraît important de prendre soin de nous.

Nous nous sommes engagés et nous sommes réunis ici parce que nous voulons prendre soin du monde.

Je milite, pour ma part, avec vous, sur l’impératif de prendre soin de nos enfants et de notre jeunesse que nous ne voulons pas abandonner au dressage des « psycho-pouvoirs » du libéralisme technocratique et médiatique.

Et je nous invite à prendre soin de nous, militants d’Europe – Ecologie – Les Verts. A ne pas confondre la disposition sacrificielle avec la générosité militante. A cesser de croire que le sacrifice de soi confère la moindre légitimité à exercer le pouvoir. A ne pas avoir peur du bonheur. A ne pas vivre en permanence avec l’inquiétude nouée au ventre de ne pas avoir un conflit à se mettre sous la dent pour ce soir ou pour demain.

J’ai appris de Patrick Viveret que les pratiques politiques actuelles utilisent et promeuvent la part la plus malade des hommes. Nous sommes gouvernés par des malades. De grands malades. Et c’est pourquoi, au sein de ce Conseil fédéral, comme partout dans notre mouvement, nous devons nous appliquer à rester en bonne santé. Individuellement et collectivement. Nos électeurs le veulent. Les français le veulent. Et croyez en un homme entré en politique il y a moins d’un an et à qui vous venez de faire l’honneur de confier la présidence de ce Conseil, notre vie politique en a vraiment besoin.

samedi 11 décembre 2010

Philippe Meirieu élu à la tête du parlement d'Europe Ecologie (Le Monde)



LE MONDE, 11/12/2010

consensuel-monsieur-federateur-philippe.jpgLes écologistes ont tenu samedi 11 décembre à afficher à nouveau leur unité après l'élection à la quasi-unanimité de l'élu rhône-alpin Philippe Meirieu à la tête du parlement d'Europe Ecologie-Les Verts, quelques jours après le refus fracassant de Jean-Paul Besset d'occuper ce poste.

Seul candidat, le pédagogue Philippe Meirieu a été élu par le vote favorable des 123 délégués présents (sur 240), 1 contre et 3 abstentions, lors du Conseil fédéral du rassemblement qui se réunissait pour la première fois depuis la fondation du parti à Lyon il y a tout juste un mois. Jean-Paul Besset, un des initiateurs d'EELV et proche de Nicolas Hulot, avait, lundi dans un courrier tonitruant, renoncé à prendre la tête du parlement du parti, dénonçant un "climat de guerre froide" entre un "parti où nombre de Verts verrouillent" les choses et la coopérative (pour les sympathisants non adhérents, ndlr) vue comme une "machine de guerre contre le parti".

"AMITIÉ, GENTILLESSE ET TENDRESSE"

L'élection dans un fauteuil de M. Meirieu permet aux écologistes de montrer à nouveau un visage uni après la crise provoquée par M. Besset. Philippe Meirieu, qui a obtenu le meilleur score EELV aux régionales de mars (18 %), c'est "Monsieur Fédérateur!", il "fait le lien entre anciens et nouveaux", s'est réjoui Jean-Louis Roumégas, du bureau exécutif.

Cécile Duflot, secrétaire nationale d'EELV, a voulu, devant les délégués, mettre l'accent sur "l'amitié, la gentillesse et la tendresse" qui se dégagent du rassemblement, souhaitant "donner tort à la lettre que Jean-Paul Besset nous a adressée" et "renouer avec l'espoir".

Pour son discours d'investiture, M. Meirieu, "tout jeune débutant en politique", a jugé les "soubresauts qui ont eu lieu inévitables" car "la clarté et la vérité sont notre ligne de conduite". Et s'il y a "des turbulences internes, il faut les transformer en propositions convaincantes pour notre avenir et notre pays", a-t-il dit, très applaudi par les cadres réunis à la salle de la CFDT qui accueillait déjà le Conseil national inter-régional (parlement) des Verts.

Pour lui, il faut désormais "nous apaiser", mais "sans perdre notre énergie" et en mettant "au coeur du débat nos projets plus que nos conflits". La question du projet justement ne se fera sans doute pas sans conflits, entre partisans d'une ligne bien ancrée à gauche et ceux plus "centristes" à l'image de Daniel Cohn-Bendit.

"COMPLOT CACHÉ"

Autre débat à régler, le statut des coopérateurs, ces militants non adhérents. Pourront-ils appartenir à un autre parti et désigner à la fois les candidats écologistes à toutes les élections, comme le souhaite "Dany" ? Enfin, le calendrier pour 2012, s'il semble faire consensus au sein de la direction, ne sera tranché que lors du prochain Conseil fédéral (29-30 janvier). A priori, le congrès devrait se tenir en avril-mai, juste avant la désignation du candidat écologiste pour la présidentielle qui devrait avoir lieu fin juin/début juillet. L'eurodéputée Eva Joly, favorite, est opposée au député Yves Cochet.

Quant à Nicolas Hulot, "ses amis, dans la situation de ceux de Dominique Strauss-Kahn", veulent repousser à l'automne les primaires, selon certains. Faux, le candidat doit "être connu le plus rapidement possible", rétorque Pascal Durand, proche de l'homme du Pacte écologique de la campagne 2007, qui dément tout "complot caché". En tout cas, selon Jean-Vincent Placé, un des dirigeants soutien d'Eva Joly, EELV parie désormais sur un score à "deux chiffres" à la présidentielle.


lundi 6 décembre 2010

Séisme à Europe Ecologie avec le retrait de Jean-Paul Besset, n°2 d'EELV


Un scoop !


Après Daniel Cohn-Bendit insatisfait de la mise en place de la coopérative d'Europe Ecologie, c'est au tour de Jean-Paul Besset de décrire un « climat de guerre froide » dans les rangs d’Europe écologie – Les Verts. Ce proche de Nicolas Hulot, n°2 du nouveau parti, regrette que « la fusion-dépassement » pourtant célébrée en grandes pompes à Lyon, il y a moins d’un mois, entre Verts et non-Verts « n'ait pas eu lieu » et annonce « renoncer à toute responsabilité », lui qui devait codiriger le rassemblement des écologistes avec Cécile Duflot… A elle, l'exécutif. A lui, le « Parlement » d'Europe écologie. Alors sursaut encore possible ou crise fatale ? La question mérite d'être posée. L'heure est grave en tout cas.

Ne dramatisons pas mais restons vigilants. Il y a beaucoup de non-Verts qui veulent jouer le jeu et de "Verts-verts" aussi. Et des non-Verts en concurrence avec d'autres non-Verts aussi, la "ligne de fracture" n'est pas forcément bloc contre bloc. Des "conservateurs" existent des deux côtés, dans quelles proportions, je ne saurais le dire... Europe Ecologie est un mouvement en mouvement, certains craignent, des deux côtés, de nouveaux apports à venir, en troupes et en personnalités, et se positionnent comme interlocuteurs privilégiés... Le pouvoir (?) est dur à partager quand on a misé très haut sur la coopérative. Mais c'est le défi que nous nous sommes lancés. A nous de transformer l'essai et de dépasser ces clivages sous-jacents, sans naïveté mais sans sectarisme non plus... C'est la crédibilité du rassemblement qui est en jeu aujourd'hui, ne fuyons pas le débat. Nous n'avons pas le droit d'échouer. A suivre...

Jean-Marc Ben



Pourquoi j'abandonne


jpbesset.jpgJ'ai décidé de renoncer à toute responsabilité au sein d'Europe Ecologie-Les Verts. Cette décision est mûrement réfléchie. Elle n'est le fruit ni d'un coup de tête ni d'un coup de blues. Elle révèle l'impuissance que je ressens de plus en plus douloureusement face à une situation de conflit interne qui m'apparaît, en l'état, dominante, indépassable, broyeuse d'énergie et d'espérance. Elle vise aussi à dissiper l'illusion fédératrice que ma présence entretient dans la direction du mouvement, entre marteau et enclume.

Autrement dit, j'avoue l'échec, personnel et collectif : je ne souhaite plus m'épuiser à construire des passerelles alors que l'essentiel des préoccupations consiste à entretenir les suspicions ou à rêver d'en découdre pour affaiblir tel courant, détruire tel individu ou conquérir tel pouvoir. Je n'assumerai pas plus longtemps la fiction et l'imposture d'un rôle revenant à concilier l'inconciliable.

Si ma mise à l'écart volontaire, dont je pèse amèrement le sens négatif aux yeux des militants sincères, peut servir à quelque chose, c'est de dissiper le rideau de fumée et chasser l'hypocrisie: que les masques tombent ! Que les couteaux sortent s'ils doivent sortir ou que les convictions l'emportent enfin sur les ambitions, mais qu'au moins il se passe quelque chose, qu'Europe Ecologie-Les Verts échappe à ce climat délétère de guerre froide et de paix armée !

I have a dream... Oui, j'avais fait le rêve que les Assises de Lyon, le 13 novembre, seraient une date « constituante », consacrant l'aboutissement d'une démarche de dépassement collectif pour construire une force alternative, responsable et désirable, indispensable aux enjeux de l'époque. Cette journée devait marquer les esprits au point de les transformer grâce à un sentiment d'appartenance commune, emportés par une dynamique qui submergerait les inévitables aigreurs, les petits calculs, les préjugés stupides, les médiocrités recuites. J'ai cru que la force de l'essentiel l'emporterait sur les turpitudes usuelles. Qu'il y aurait donc un avant et un après Lyon...

Je me suis trompé. Lourdement. Il est impossible de parvenir à faire la paix entre ceux qui aspirent à la guerre.

Il y a bien un après Lyon... mais, à l'image du nom retenu (Europe Ecologie-Les Verts), il reproduit ce que nous avions eu tant de mal à contenir dans l'avant Lyon : le scénario des crispations et des jeux claniques, la comédie du pouvoir, le monopoly des territoires. Règlements de compte, délices du déchirement, obsessions purificatrices et procès en sorcellerie saturent à nouveau l'espace, au point de rendre l'air interne irrespirable et le travail politique secondaire.

La fusion-dépassement n'a pas eu lieu. Le fossé des défiances reste plus béant que jamais entre ceux supposés vouloir rester en famille et ceux suspectés de chercher le divorce pour la recomposer, rendant impossible toute entreprise commune. D'un côté, le parti où nombre de Verts verrouillent une reproduction à l'identique, avec les mêmes têtes, les mêmes statuts, les mêmes pratiques, les mêmes courants, la même communication pseudo radicale, la même orientation servile vis à vis de la gauche; de l'autre côté, la Coopérative que certains veulent instrumentaliser en machine de guerre contre le parti. Dans ces conditions, aucune discussion sereine, aucun désaccord rationnel ne peut exister. Chaque choix est hypothéqué, chaque initiative s'avère lourde de conflits.

Par bonheur, la dramaturgie de nos luttes fratricides en reste aux simulacres. Elle ne tue pas vraiment mais elle use, elle ronge, elle épuise, elle désespère. Certains bâtisseurs, comme mon vieux complice Pascal Durand, ont déjà pris leurs distances. A mon tour de déclarer forfait et de refuser d'assumer plus longtemps un rôle d'équilibre alors qu'on me somme chaque instant de choisir un camp, de dénoncer machin ou de sacrifier truc, de justifier le moindre acte des « autres », de prendre parti dans le choc des ego, de participer au grand concours des détestations, bref de faire tout ce que je déteste.

J'ai contribué à construire un mouvement que je juge désormais métastasé et auquel, pas plus que quiconque, je ne sais apporter de remèdes. Je n'entretiens aucun ressentiment, j'apprécie les qualités individuelles des un(e)s et des autres, je ne regrette rien du chemin. Mais, sous l'impact de trop fortes pesanteurs internes engendrées par les coutumes du vieux monde politique dont toutes – je dis bien toutes! - les sensibilités d'EELV portent les stigmates, la mayonnaise collective a tourné et déprécie maintenant les énergies.

C'est humainement insoutenable. C'est en tout cas à mille lieux du projet qui m'habitait. Je renonce donc sans rien sacrifier de mon espérance dans l'écologie politique comme horizon de survie et d'émancipation. Sous réserve, peut être, d'un sursaut durable et d'un ressaisissement collectif que mon retrait pourrait favoriser.


6 décembre 2010
Jean-Paul Besset

samedi 13 novembre 2010

"La naissance des unis verts" (Libération)


LIBÉRATION, 13/11/2010
Europe Ecologie et les Verts fusionnent, samedi à Lyon, première étape d’un long chantier.
Par Matthieu Écoiffier

unis_verts.jpgSamedi, ce n’est pas seulement une fête qui a lieu à Lyon pour célébrer l’union des Verts et d’Europe Ecologie, assurent leurs leaders Cécile Duflot et Daniel Cohn-Bendit. Mais «un moment un peu solennel. Le baptême d’une nouvelle force», assure Yannick Jadot, futur porte-parole du nouveau mouvement. Pour l’heure, le bébé écolo est encore tout fripé. Certains comme Gaby Cohn-Bendit lui trouvent même trop de ressemblance avec son géniteur Verts. Son poids reste fragile qui oscille entre 16,28% aux européennes de 2009 à 12% aux régionales de mars. Et il n’a pas encore de nom : ce sera aux 2 000 militants attendus samedi au palais des congrès de voter pour lui en donner un.

Il pourrait finalement porter celui de ses deux parents : «Europe Ecologie-les Verts». Pour ne froisser personne.

Reste que la présence à Lyon au-dessus du berceau de Nicolas Hulot, la bonne fée du Pacte écologique, est interprétée comme «un bon signal» par Duflot, candidate pour rester à la tête de la future direction. «Que Hulot vienne démontre qu’on a réussi. Beaucoup ont douté de notre capacité à aller jusqu’au bout du rassemblement et de l’importance de créer une force autonome. Hulot disait qu’il fallait que l’écologie soit partout, il constate qu’elle n’est pas au gouvernement», interprète Jadot. «Hulot est là, la directrice de sa fondation aussi, Serge Orru, le patron du WWF ou la sociologue Esther Benbassa. Nous avons un très beau tour de table», se félicite Jean-Vincent Placé, ex-numéro 2 des Verts. Autre présence de marque : Hélène Pelosse, experte des énergies renouvelables et ex-directrice adjointe de cabinet de Jean-Louis Borloo, chargée du dossier Copenhague. Mais pour conforter sa troisième place dans le paysage politique, trois défis attendent le mouvement de l’écologie.


Le défi de l’ouverture

Après avoir réussi à rassembler les familles de l’écologie, de l’altermondialiste José Bové au «ni droite ni gauche» d’Antoine Waechter - qui fera son grand come-back samedi -, tout en s’ouvrant au mouvement social d’Emmanuelle Cosse (ex-Act Up), au pédagogue Philippe Meirieu ou à la juge Laurence Vichnievsky, l’enjeu est de poursuivre cette «ouverture perpétuelle».«On a rassemblé la plupart des écologistes, nous devons rassembler au-delà. La transformation écologiste, ce n’est pas la lutte des classes : on n’y arrive pas en mobilisant une moitié de la société contre l’autre», martèle Daniel Cohn-Bendit.

Pour ce faire, le nouveau mouvement parie sur une formule originale avec d’un côté un parti et ses adhérents et de l’autre un réseau peuplé de «coopérateurs». Après un long bras de fer sur la répartition des pouvoirs entre adhérents et coopérateurs, le compromis validé à 85% par référendum par les Verts - condition de leur fusion dans le rassemblement - donne le droit aux coopérateurs, «rebutés par la tambouille interne» (selon Duflot), «de participer à la construction du programme et à la désignation du candidat à la présidentielle», indique le proche de Hulot, Jean-Paul Besset, pressenti pour présider le parlement du mouvement (lire ici). En avril-mai, un congrès sera organisé pour que les adhérents désignent leurs représentants dans les instances de direction. Les coopérateurs pourraient les rejoindre au même moment pour choisir entre Eva Joly et Yves Cochet, les deux candidats déclarés à la présidentielle. «Coupler les primaires et le congrès permettrait de se concentrer sur le projet», plaide Jadot. Mais Duflot «se demande si c’est le bon timing».


Le défi de l’autonomie face au Parti socialiste

Dans son manifeste, «EE-les Verts» ne «se définit pas par rapport à la gauche et à la droite», rappelle son coauteur Jean-Paul Besset. Pour l’eurodéputé, le mouvement écologiste ne fait pas partie de la maison commune de la gauche, mais compte bien entretenir des relations de bon voisinage avec le PS pour faire échec à Nicolas Sarkozy. A l’approche des cantonales de mars et des sénatoriales de septembre 2011, c’est mal parti : «On a un accord avec le PS dans trois départements sur 100», indique l’ex-Vert Jean-Marc Brulé. Après avoir tonné contre «les petites seigneuries locales du PS» dans le Monde et proclamé son objectif «de devenir majoritaire», Duflot va tenter de calmer le jeu à Lyon en se disant «convaincue de la nécessité de faire un accord avec le PS pour construire une alternative». Mais le désir d’émancipation titille EE-les Verts. Le nouveau mouvement peut être tenté de prendre exemple sur l’Allemagne, où les Grünen, désormais crédités de 24% dans les sondages, doivent leur progression au ralliement d’une partie des libéraux du FDP et d’une certaine frange des chrétiens-démocrates (CDU).

Le défi d’Eva Joly

«Deux électeurs sur cinq d’EE ne se considèrent pas de gauche», rappelle Denis Pingaud, vice-président d’OpinionWay, dont le dernier opus (1) projette les attentes de cet «électorat stratège et volage» pour 2012. «Il ne se satisfera pas d’un accord gauche plurielle pour quelques postes de ministres. Ses électeurs votent EE pour dire qu’il y a urgence écologique, mais aussi parce qu’ils veulent une autre manière de s’opposer à Sarkozy.» Bref, faire 7% dans la roue du PS, ou alors entre 12% et 15% et incarner l’urgence écologique, l’exigence éthique et sociale, «en s’affirmant comme meilleur que le PS pour rassembler au second tour», dixit Pingaud. Tel est le défi d’Eva Joly.


(1) "Europe Ecologie : électorat volage, électorat stratège". Ed. Fondation Jean-Jaurès