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COMMENTAIRE

45_Ben.jpgLe 22 septembre au matin a donc eu lieu le démantèlement de la jungle, opération surtout médiatique mais qui continuera de susciter plus de questions que d'apporter de véritables réponses. Au fond, et de façon encore moins glorieuse, le gouvernement nous a fait un remake de Sangatte. Comme Sangatte, mais plus rapidement qu'alors, on peut dire que c'est un échec. L'objectif premier, annoncé à longueur de communiqués et de visites ministérielles, c'était d'éradiquer les réseaux de "passeurs armés". Non, on ne rit pas, l'occasion s'y prête mal, mais quand même... Dans une situation de guerre déclarée comme celle-là, on n'invite pas les passeurs à déguerpir avant l'assaut final ! La mise en scène est évidente: il fallait entourer l'opération de quelques artifices. On cible la communication en dramatisant la situation (à l'extérieur, la jungle est bien ressentie comme une zone de non-droit, à feu et à sang) et en préparant les esprits à l'offensive générale. On désigne l'ennemi: les passeurs. Et les CRS qui vont débarquer deviennent comme dans un film américain une armée de libération. Et pour faire plus vrai, quelques centaines de migrants disparaissent avant l'assaut, sans doute "échangés" avec les services secrets britanniques, pour montrer l'efficacité de l'intervention. De la fiction, direz-vous ? On imagine bien un deal, savamment orchestré, comme un échange de bons services. Les anglais pouvaient bien faire un geste quand même, pour nous qui les protégeons de l'"invasion islamiste". On fait plaisir à l'UMP et aux franges les plus réactionnaires du pays. Mais attention, au risque de me répéter, c'est un cadeau à l'extrême-droite qui saura bien un jour tirer les marrons du feu, surtout quand la population calaisienne s'apercevra de la supercherie. Car rien ne changera, tant que la problématique ne sera pas gérée à l'échelle européenne.
Bon, revenons au cercle de silence organisé le soir même par les associations. J'y ai participé, avec quelques amis Cap21 et MoDem. J'y ai rencontré, pour les politiques locaux, des militants Verts et NPA. Je comprends que tout le monde politique ne puisse pas être là en même temps au même endroit (ce qui a été mon cas pour le matin car n'étant pas un professionnel de la politique je n'ai pas cette disponibilité qu'ont certains) mais à 18h30, on a quand même plus de possibilité, non ? Or je n'ai vu aucun représentant socialiste ou communiste à ce rendez-vous. Comme on n'a vu aucune prise de position officielle contre le coup de force gouvernemental. Je trouve que c'est triste. Pour l'anecdote, mes amis et moi apercevons en face de nous quelques drapeaux estampillés PCF. Nous ne reconnaissons aucun de ces porteurs, et pour cause. L'un d'entre nous (le plus audacieux) va à leur rencontre et apprend qu'ils viennent de Marly ! Des communistes de Marly à l'insu de la section de Calais du PCF ? Surréaliste, non ?

Non, je ne suis pas étonné de ces défections politiques. Les élus écologistes de l'ancienne majorité municipale de Jacky Hénin ont été les seuls, longtemps, à poser la question des réfugiés au Conseil Municipal. On se souviendra des altercations que nous avions sur ce sujet. Le PS et le PC n'ont d'ailleurs jamais été très clairs sur la fermeture de Sangatte. Qui a demandé la fermeture du centre ? Des élus de la majorité, le maire socialiste de Sangatte en 2002, André Ségard, le député socialiste de la circonscription, Jack Lang, et le maire communiste de Calais, Jacky Hénin. Jacky Hénin, le maire communiste de Calais, qui a accompagné Nicolas Sarkozy à Londres, estime que "les États ont agi avec humanité" et que "lorsqu’on voit la vitesse à laquelle on est parvenu à un accord, on se dit qu’on a perdu beaucoup de temps avant". Satisfait lui aussi, le député Jack Lang... Depuis, les avis se sont recentrés sur un discours plus politiquement correct (ils savent s'adapter) mais on sent encore aujourd'hui la gêne par rapport à leurs propos de 2002. André Ségard fera même passer au Syndicat Mixte de la Côte d'Opale une motion réclamant la fermeture du centre de Sangatte, à l'unanimité de la droite et de la gauche confondue, à l'exception de ma voix (contre) et de celle de Daniel Halloo (abstention). Ca, c'est la réalité ! Aujoud'hui, ce n'est pas qu'ils ont la mémoire courte ! Ils se font simplement un peu oublier... et ils y réussissent.

Jean-Marc Ben


C'Sur et Salam, entre autres, ont signé hier un texte commun.

« Nous, associations engagées quotidiennement auprès des migrants, sommes convaincues que le plan gouvernemental de destruction des jungles est inefficace et aggrave la situation. C'est provoquer l'éparpillement des camps, livrer les migrants aux réseaux mafieux et ne rien régler sur le fond. C'est persister dans l'erreur de 2002. Depuis le discours de M. Besson en avril, le nombre de migrants visibles à Calais a baissé. Certains sont passés en Angleterre. Rares sont ceux qui ont pu déposer une demande d'asile en France. La plupart ont fui les menaces policières, les autres se sont disséminés dans la nature. Ils sont plus que jamais vulnérables, privés d'accès aux soins et à la nourriture et livrés à la seule loi des mafias. Que deviendront ceux qui seront arrêtés dans les jours qui viennent ? Expulsés dans leur pays d'origine ? Relâchés dans la nature ? Renvoyés en Italie ou en Grèce où les conditions de vie des réfugiés sont dramatiques ? Le gouvernement propose une aide au retour volontaire vers des pays en guerre et des dictatures. Combien accepteront de retourner en Afghanistan, Irak, Iran, Somalie, Soudan, Érythrée (...) ? Le gouvernement communique beaucoup sur la tradition d'asile de la France mais une infime partie des migrants a eu la possibilité de demander l'asile. La plupart en est empêchée par le règlement européen Dublin II que la France applique avec zèle, sans utiliser le pouvoir qu'elle a d'en suspendre l'application (...) »

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> Les associations signataires appellent les Calaisiens à un cercle de silence, aujourd'hui à 18 h 30 devant les 4-B.