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LIBERTÉ N°877 du vendredi 4 au jeudi 10 septembre 2009


"Plus révolutionnaire que jamais, l'ex-Vert, ex-Alternatif, ex etc, Jean-Marc Ben est du voyage à lʼUniversité dʼété du MODEM à la grande Motte. Au fil des mois, on comprend mieux «lʼefficacité» des élus écologistes dʼalors dans la défaite de Jacky Hénin et de son équipe en mars 2008 (J.M. Ben était 7ème sur la liste dʼUnion de la Gauche !)"



COMMENTAIRE


Les communistes calaisiens, du moins les auteurs de cette brève assez ridicule dans LIBERTÉ, ont du mal à l'avaler. Pour eux, quand un adjoint de l'ancienne municipalité communiste rejoint le MoDem, c'est qu'il passe dans le camp de l'ennemi héréditaire, la "DROITE !" (prononcez avec l'intonation de Michel Galabru lorsqu'il éructe "LE NORD !" dans "Bienvenue chez les Chtis").

Mais là où le PC local fait fort, c'est lorsqu'il revisite l'histoire politique dans une sorte de révisionnisme des municipales à Calais. La défaite ? C'est la faute des élus écologistes ! Ah ben voilà, fallait le trouver !

Le PC se dédouane. Avant il y avait les écoles du parti pour former les camarades. Aujourd'hui, c'est la méthode Coué.

Certes, le PC fera sans doute son autocritique dans quelques années et évaluera plus sérieusement les raisons de sa défaite, qui reste avant tout celle de Jacky Hénin. Pour l'instant il se fait un peu de cinéma et répète "Jacky, le retour II" mais sans grande conviction. Il s'agit d'abord de maintenir le moral des troupes et les écologistes, qui n'ont jamais été en odeur de sainteté au Parti Communiste, deviennent un bon angle d'attaque.

Au fond, je comprends l'intérêt de la brève: le PC local sait déjà qu'il n'arrivera plus à rassembler autour de lui pour les prochaines municipales à Calais et il se replie naturellement sur un schéma "union de la gauche" classique qui lui a profité dans les années 1970, mais qui n'a plus de pertinence aujourd'hui. Est-ce que le PC dirait aujourd'hui que le PS a joué un rôle dans sa défaite de 2008 ? Non, tandis que mettre ça sur le dos sur les écologistes de l'ancienne majorité municipale et sur les Verts qui nen faisaient pas partie, voilà qui peut parler aux militants. Le PC craint plus que tout un rassemblement large, dans l'esprit de ce qui s'est passé à Marseille entre Vincent Peillon (PS), Robert Hue (PCF), Daniel Cohn-Bendit (Europe Ecologie) et Marielle de Sarnez (MoDem). Et à Calais, pas question pour les communistes d'accepter une sorte de 3ème voie. Raison de plus pour cibler ceux qui sortent du schéma préétabli par eux. Question subsidiaire: et si les socialistes sortaient eux aussi de ce cycle perdant-perdant ?

Je n'ai rien contre les communistes. Je les ai côtoyés trop longtemps pour ne pas les aimer un peu, certains plus que d'autres. Mais cela fait plusieurs fois qu'ils m'asticotent, dans ''Liberté'', "Le Rusé*, ou la presse locale. A cette fréquence, ce n'est sans doute pas innocent politiquement. Les défaites, collectives ou personnelles, doivent nous aider à réfléchir, pas de nous enfermer dans une posture revancharde. Le projet municipal de la gauche était-il à la hauteur des enjeux locaux ? Je pense que non. L'obstination des communistes à refuser l'ouverture au 2ème tour n'a-t-elle pas joué ? Assurément. Enfin, les partis "dominants", qu'il s'agisse du PCF à Calais ou du PS ailleurs, gagneraient à devenir plus humbles, moins méprisants pour leurs alliés. La recomposition politique en cours dans le pays et dans notre cité devrait calmer leurs tentations hégémoniques.

Les écologistes ont mal vécu les négociations programmatiques avec la gauche PC-PS (j'ai déjà communiqué sur ce sujet) et ont été écrasés par les deux "frères ennemis". Nos propositions ont été rejetées à 80% et nous savions pour notre part que le programme de l'équipe sortante n'allait pas être assez mobilisateur et qu'il n'aurait pas fait "rêver". Les écologistes étaient redevenus des supplétifs. Simple rapport de force: ne plus appartenir à un parti vous fragilise (cette leçon vaut pour toutes les majorités municipales, quelles qu'elles soient). Il y a une leçon à tirer de ces municipales 2008: 1°) C'est le projet qui compte, pas les combinaisons d'appareils; 2°) Plus aucun parti n'a de droit "naturel" à l'hégémonie, pas plus le PC que le PS. Cela vaut aussi pour la nouvelle majorité municipale dirigée par l'UMP.

Si l'union consiste à se rallier à celui qui s'autoproclame "le plus fort", alors c'est pourri d'avance. Que ce soit pour Jacky Hénin ou aujourd'hui Natacha Bouchart. L'union n'est pas un ralliement.

Personnellement, après avoir été carté vert et alternatif pendant 14 ans, et écologiste indépendant non carté ces 6 dernières années, j'ai décidé, toujours écologiste, de rejoindre le MoDem parce que j'ai estimé que c'était là où il se passerait le plus de choses à l'avenir, de par sa position centrale, de pivot. Et en effet depuis un mois le MoDem est devenu le "centre" d'intérêt de la classe politique. On n'y fait certainement pas de la politique autrement (je doute que ceux qui en parlent le plus le fassent vraiment), mais au moins on y fait de la politique honnêtement et courageusement. Suite à cette Université de rentrée du MoDem, à laquelle j'ai participé (avec Michèle Courmont, Jean-Marc Leroy, Gérard Clais, Paméla Bourigeaud, Gilles Brunot, Jean-Marc Pichon), nous travaillons d'abord sur le projet, pour le confronter aux autres, dans la perspective d'une alternative politique au système Sarkozy.

Alors, chers camarades, NOUS ne posons aucune exclusive au nouveau rassemblement écologique, social et démocratique, rien ne servira de "diaboliser" le MoDem parce qu'il vous apparaît comme le prolongement de l'ancienne UDF ou parce qu'il sort de votre schéma gauche-gauche qui n'est pas majoritaire de toute façon dans la société. Chers camarades, le MoDem sera peut-être une chance pour vous dans une autre configuration, cessez de nous attaquer, respectons-nous, l'histoire n'est pas écrite d'avance. Songez, même si ça vous fait mal a priori, au "compromis historique" du Parti Communiste Italien (avec Enrico Berlinguer), qu'a rappelé fort à propos Robert Hue lui-même à Marseille.

Vous n'avez plus la main, mais vous n'êtes pas perdus pour autant.

Jean-Marc Ben


*Rusé: "Rassemblement Unitaire Social Écologique". L'adjectif "écologique" me semble de trop, il y a usurpation d'identité politique, non ? Si on enlève donc le "É", cela devient le RUS... Tiens, en prononçant toutes les lettres, ça fait tout de suite plus "rétro"!